Police autochtone : des offres gouvernementales toujours insatisfaisantes, selon les chefs

25 avril 2018

Nouveau véhicule de la Sûreté du Québec.

Les chefs des communautés autochtones de l'Abitibi-Témiscamingue ayant leur propre service de police estiment que les offres gouvernementales sont insuffisantes pour financer adéquatement un service qu'ils jugent pourtant essentiel (archives). Photo : Radio-Canada/Laurence Gallant

Les chefs des communautés autochtones de l'Abitibi-Témiscamingue ayant leur propre service de police estiment que les offres gouvernementales sont insuffisantes pour financer adéquatement un service qu'ils jugent pourtant essentiel.

Un texte de Thomas Deshaies

« On nous a présenté un budget déficitaire, mais si c'est pour être comme cela, on ne signe pas l'entente, nous autres », s'exclame la chef de Lac-Simon, Adrienne Jérôme.

Rappelons que les négociations entre les gouvernements du Québec et du Canada et les communautés autochtones pour assurer le financement des services de police autochtones devaient initialement prendre fin le 31 mars 2018, mais elles se poursuivent toujours.

Mme Jérôme affirme que les gouvernements auraient présenté un financement qui ne permettrait pas de garantir la présence au poste de quatre agents simultanément, comme l'a recommandé la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Pour respecter cette directive, la communauté devrait s'endetter de 500 000 $, affirme-t-elle.

La chef de la communauté de Lac-Simon, Adrienne Jérôme

La chef de la communauté de Lac-Simon, Adrienne Jérôme Photo : Radio-Canada

C'est la déception aussi pour la communauté de Kebaowek Kipawa. « On espère qu'il va y avoir un peu plus d'ouverture, parce que recevoir de l'argent pour deux officiers, pour un poste qui en a besoin de quatre, c'est quasiment nous dire qu'on va fermer le poste », déplore David Mclaren, conseiller responsable de la sécurité publique.

À Pikogan, on déplore aussi que les gouvernements refusent, à ce jour, d'octroyer du financement pour l'embauche d'un policier qui permettrait d'éviter qu'il y ait un seul patrouilleur durant la nuit. « Il en va de la sécurité de nos agents », fait savoir le chef, David Kistabish.

La question sera abordée l'année prochaine, selon le fédéral

Antoine Bourdages, directeur des Programmes de sécurité communautaire à Sécurité publique Canada, souligne d'entrée de jeu que les discussions se poursuivent. « L'octroi de financement a augmenté, ce qu'on n'avait pas vu depuis une douzaine d'années, souligne-t-il. C'est un financement qui est aussi devenu permanent. » Il souligne qu'il sera également augmenté de 2,75 % par année.

Il explique toutefois devoir négocier avec des budgets qui ne sont pas illimités. « On travaille avec l'enveloppe qu'on a », mentionne-t-il.

Les négociations en cours sont davantage pour « consolider » les services offerts, fait-il remarquer. L'ajout de policiers sera discuté l'année prochaine par l'entremise d'une enveloppe budgétaire distincte. Jusqu'à 110 policiers supplémentaires pourraient ainsi être embauchés.

Les chefs affirment qu'ils ne veulent pas attendre un an sans avoir l'assurance qu'ils obtiendront du financement pour des effectifs supplémentaires. Dans certains cas, comme à Kebaowek, il s'agirait plutôt d'obtenir les fonds pour couvrir les salaires d'agents déjà en fonction. « Il y a plus de communautés autochtones que de policiers supplémentaires », fait remarquer le chef de Pikogan, David Kistabish.

Deux poids, deux mesures, selon les chefs

« Première des choses, [les gouvernements] devraient arrêter de parler d'un programme policier, c'est un service essentiel », s'insurge David McLaren. Une opinion partagée également par Adrienne Jérôme et David Kistabish, qui ont l'impression que les gouvernements financent pourtant sans difficulté la Sûreté du Québec et la Gendarmerie royale du Canada.

Les chefs se disent déçus par la réponse gouvernementale, d'autant plus que le sujet a été maintes fois abordé lors des audiences de la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics. « Ça m'étonne beaucoup qu'il n'y ait pas plus de mouvement vers la bonification », commente M. Mclaren. « On dirait que c'est [la commission d'enquête] juste pour le bien faire paraître, le gouvernement, s'exclame quant à elle Adrienne Jérôme. Le gouvernement, il ne bouge pas ben ben ces temps-ci. »

David Kistabish, chef de Pikogan

« Il y a quand même une certaine permanence et assurance [du financement pour la SQ et la GRC] qu'effectivement, on n'a pas la même impression qu'on a quand on regarde comment les services policiers autochtones sont financés », ajoute Antoine Bourdages.

Il explique que d'importantes avancées ont toutefois eu lieu, mais qu'on peut faire mieux. « On a pris l'engagement de poursuivre ce dialogue, en termes de comment on peut concevoir la police autochtone dans l'avenir, pour établir les choses sur des bases plus solides », mentionne M. Bourdages.

Les représentants du ministère de la Sécurité publique du Québec ne nous ont pas accordé d'entrevue. « Des rencontres de travail se poursuivent toujours afin de préciser les modalités de financement des prochaines ententes à conclure. Rappelons que le Québec souhaite favoriser la création et le maintien de CPA [corps de police autochtone] autogérés dans les communautés autochtones », a-t-on toutefois mentionné par courriel.

Les négociations reprendront la semaine prochaine.

 

Cliquez ici pour lire l'article intégral de Thomas Deshaies / Radio-Canada / 25 avril 2018

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